La brioche de Nanterre révèle une histoire millénaire et des techniques précises pour sa réalisation.
- Origines historiques : tradition remontant à 451 avec sainte Geneviève, commercialisée par des marchandes ambulantes dès 1545
- Recette authentique : 500g de farine T45, 250g de beurre, 3 œufs, sans lait contrairement aux versions modifiées
- Façonnage caractéristique : 6 à 8 boules alignées dans un moule rectangulaire, levée à maximum 29°C
- Cuisson professionnelle : four à 170-180°C, double dorure à l’œuf pour une couleur dorée parfaite
Cette fameuse brioche rectangulaire occupe une place particulière dans l’univers de la pâtisserie française. Comme restaurateur, j’ai eu l’occasion de la travailler à maintes reprises dans ma cuisine, et je peux vous assurer que sa texture si particulière ne laisse personne indifférent. Cette spécialité de la région parisienne mérite qu’on s’y attarde, tant pour son histoire fascinante que pour sa technique de réalisation bien spécifique.
Des origines millénaires aux traditions nanterroises
L’histoire de cette brioche emblématique plonge ses racines dans l’Antiquité tardive. En 451, un archidiacre d’Auxerre apporte des eulogies à sainte Geneviève, marquant les prémices de cette tradition pâtissière. Dès le XIIIe siècle, les chanoines de l’abbaye de Sainte-Geneviève recevaient déjà de petits gâteaux marqués de l’effigie de leur sainte patronne.
Ce qui me captive particulièrement, c’est l’évolution commerciale de ces gâteaux. Dès 1545, des marchandes ambulantes parcouraient à pied le chemin depuis Nanterre jusqu’à Paris pour écouler leur production. Jean-Jacques Rousseau lui-même évoque ces vendeurs dans ses « Rêveries d’un promeneur solitaire », témoignant de leur popularité entre 1776 et 1778.
Le commerce florissait sous l’Ancien Régime et perdura jusqu’au milieu du XIXe siècle. Malheureusement, la pénurie de blé de 1914 porta un coup fatal à cette tradition. Ces gâteaux disparurent presque complètement après la Première Guerre mondiale, avant de renaître au XIXe siècle sous la forme que nous connaissons aujourd’hui.
La recette authentique du professionnel
Contrairement aux nombreuses variantes trouvées sur internet, la vraie recette traditionnelle respecte des proportions précises. Dans mon restaurant, j’ai appris à mes équipes l’importance de ces dosages ancestraux issus du CAP Boulanger. Voici la composition authentique qui fait toute la différence :
| Ingrédient | Quantité (pour 8 portions) | Rôle |
|---|---|---|
| Farine T45 | 500g | Structure et gluten |
| Œufs battus froids | 3 œufs (150g) | Liant et moelleux |
| Beurre mou | 250g | Richesse et saveur |
| Sucre | 50g | Goût et dorure |
| Levure fraîche | 12g | Fermentation |
| Sel | 8g | Exhausteur de goût |
Point crucial que j’explique toujours à mes stagiaires : la pâte à brioche authentique ne contient traditionnellement pas de lait, contrairement à ce que suggèrent de nombreuses recettes modifiées. Cette composition fait d’elle la plus riche de toutes les pâtes en boulangerie.
Le pétrissage nécessite une attention particulière. Tous les ingrédients doivent être bien froids pour éviter que le beurre ne fonde. Je recommande toujours l’utilisation d’un robot avec crochet, comme vous pourriez le découvrir dans ma recette de brioche moelleuse facile à la main sans robot. La pâte doit être pétrie jusqu’à ce qu’elle se décolle parfaitement des bords de la cuve.
Technique et façonnage de la brioche rectangulaire
Le façonnage caractéristique de cette brioche la distingue de toutes les autres. Contrairement à la brioche parisienne avec ses deux boules superposées, celle de Nanterre se compose de plusieurs petites boules alignées dans un moule rectangulaire. Personnellement, je préfère travailler avec 6 ou 8 boules selon la taille souhaitée.
Après le pétrissage, la pâte doit reposer 45 minutes à 1h30 à température ambiante pour doubler de volume. Vient ensuite le dégazage, suivi d’une réfrigération obligatoire de 1h30 minimum, parfois toute une nuit. Cette étape raffermit la pâte et facilite le façonnage.
Le processus de levée se déroule en plusieurs étapes :
- Division de la pâte en portions égales
- Formation de boules parfaitement rondes
- Disposition dans un moule à cake généreusement beurré
- Seconde levée de 1h à 2h à 25-28°C maximum
- Double dorure à l’œuf battu
L’astuce que j’ai apprise avec l’expérience concerne la température de levée. Ne jamais dépasser 29°C, sinon le beurre fond et compromet la texture finale. La pâte peut paraître collante, mais résistez à l’envie d’ajouter de la farine supplémentaire.
Astuces professionnelles pour réussir sa brioche
Au fil des années dans mon métier, j’ai développé plusieurs techniques qui font la différence. D’abord, l’utilisation de farine T45 de qualité s’avère primordiale. Sa teneur plus élevée en gluten par rapport à la T55 permet un meilleur développement du réseau glutineux, garantissant cette texture si particulière.
La cuisson demande également de la précision : four préchauffé à 170-180°C pendant 15 à 30 minutes selon la taille. La brioche doit présenter une belle couleur dorée et sonner creux quand on tapote le dessous. Cette viennoiserie offre une texture moelleuse avec une mie filante caractéristique.
Son goût subtil de beurre, sans excès de sucre, en fait une base polyvalente. Elle accompagne parfaitement confitures et pâtes à tartiner, mais se déguste aussi nature. Dans mon établissement, je l’utilise parfois pour des toasts originaux ou comme base pour certains desserts, à l’image de ces petits sablés de grand-mère qui partagent cette même philosophie du fait-maison.
Cette spécialité de Nanterre a conquis le monde entier : Roumanie, Nouvelle-Calédonie, États-Unis. Sa forme rectangulaire distinctive et sa technique particulière continuent de séduire les amateurs de vraie pâtisserie traditionnelle. Maîtriser cette recette authentique, c’est perpétuer un savoir-faire ancestral qui mérite d’être préservé.